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  • Mar 28 Mar - 18:36
    L'humidité de la jungle a quelque chose de reposant, après avoir arpenté le désert, pour une fille de l'eau. Capella n'est pas non plus dans son élément naturel, mais elle apprécie quand même la lourdeur du climat à sa juste valeur, autant que celle de l'atmosphère. La terre teintée de sang dans laquelle s'enfoncent légèrement ses sandales, les vestiges rouillés qui ornent les dépouilles abandonnées… Le soleil couchant dans son dos, elle s'enfonce sereinement entre les fougères et les lianes. Le village qu'elle doit atteindre pour remplir son contrat se situe un peu plus loin à l'est, et si ses calculs sont bons, il se situe à moins d'une heure de marche.

    Ses pas la mènent jusqu'à une clairière, où l'odeur de la mort est encore fraîche. La mercenaire observe rapidement les environs : que des cadavres, pas de feu de camp récent, et pour seul bruit de fond, les sons distants des animaux qui résonnent entre les épais feuillages. Ici, il n'y a que la Mort.

    Pieuse devant un tel spectacle, elle s'arrête pour chanter une prière. Ombres protectrices, Ombres salvatrices, accueillez ces âmes dans votre royaume. Au milieu de son cantique, la sirène change de langue, et c'est en bas-parlé qu'elle siffle et râle la fin de sa chanson. Plus le temps passe, et plus cette façon d'exprimer sa foi lui vient naturellement, encore plus qu'avant.

    Comme si les mots avaient un pouvoir, comme si la Mort l'avait entendue, et surtout comme si elle contemplait les alentours d'un œil nouveau, Capella remarque quelque chose d'intéressant. Dans un des cadavres est planté une lame joliment forgée, qui semble avoir beaucoup de valeur. Elle fait quelque pas dans sa direction, et se penche au-dessus du corps. L'odeur de la putréfaction l'incommode, mais beaucoup moins qu'elle devrait. Cette épée est bien plus intéressante.

    Que penseront les Ombres en la voyant planter ses pieds dans les viscères en décomposition, prenant appui sur le corps froid et dévoré par les vers, pour en extraire une telle arme ? Certains auraient peur d'avoir pillé un cadavre, et manqué de respect à l'être qu'il était. La jeune sirène, elle, est simplement satisfaite : ce n'est pas un vol, c'est un cadeau du destin. Les Gardiens ont entendu sa dévotion, et l'ont récompensée en lui faisant voir la violence pour ce qu'elle est - pour ce qu'elle entraîne. La mort, et la vie qui se construit par-dessus.

    Elle tirera de cette épée un bon prix, pense-t-elle. C'est le cycle naturel des choses. Les faibles meurent et gisent dans la terre, et les autres continuent d'avancer avec ce qu'ils ont laissé derrière. Capella arrache une feuille à un jeune bananier pour essuyer la lame, puis se remet en chemin.

    Elle a d'abord une mission à remplir.

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  • Jeu 30 Mar - 16:07


    Un flash de lumière, le reflet métallique balaye sa vision d’un bout à l’autre dans un geste fluide. Le gris devient rouge. Les sons explosent dans la coquille d’acier, la résonance est insupportable mais moins encore que la douleur qui se diffuse d’un seul coup dans la chair. Une irradiation intense qui brûle tout sur son passage au fur et à mesure que l’épée tranche le corps du malchanceux qui se trouve du côté de son tranchant effilé, elle paralyse le corps et écrase l’esprit de sa victime. Plus rien d’autre n’importe en ce moment que la délicieuse souffrance qui l’accapare. Le sang gicle emporté par la lame fatidique. Le sol laisse sa place au ciel à travers la visière. Un bruit sourd retentit lorsque le corps s’affale par terre, le liquide chaud se déverse avec ses entrailles sur le sol et imbibe la boue de viscères. Les hurlements retentissent partout tandis que la bataille fait rage autour, les Shoumeïens s’écroulent les uns après les autres.

    Le souvenir a beau être flou, il reste agréable pour Violence. Tiré de la nimbe de mémoire qui la constitue elle revisualise l’évènement inlassablement pour s’en ressasser les sensations et se remémorer chaque détail encore clair. Elle ne réfléchit plus, elle se contente de revivre le moment, c’est une façon pour elle de ne pas faire attention à la plénitude insupportable de l’existence. Juste avant d’entrer dans cette transe commémorative elle jubilait du massacre qui s’opérait dans la jungle reikoise, des bandits dont le chef paraissait prometteur en tant que manieur du Démon l’avait emporté dans une excursion en quête de plantes rares pour le compte d’un groupe de riches apothicaires mais malheureusement pour eux ils avaient succombé à un autre détachement de pillards, ils s’étaient pour la plupart entretués et l’incarnation de la guerre avait fini par prendre les choses en mains, tant littéralement que figurativement en faisant appel à Praelia pour achever les dernières victimes. Restant après ça sur sa faim, Violence profitait donc de l’atmosphère nouvellement chargée en sordide pour piquer un somme. Ce n’était pas exactement un sommeil dans le sens où elle n’en avait pas besoin physiologiquement, mais lorsque la vie devenait aussi calme et insipide elle préférait ne pas être consciente pour la subir.

    Lorsque le fragment d’âme toucha à sa fin une fois de plus, Violence décida qu’il était grand temps de bouger, elle avait dû récupérer sa mana pour pouvoir se téléporter ailleurs et… elle bouge.

    Rétablissant sa perception à travers sa lame et son pommeau elle dévisage la femme qui la porte. Elle marche dans la végétation avec un légèrement plus de difficultés que les bandits tantôt, mais elle semble forte. C’est une femme à l’allure soignée, une vision étrange au milieu de la flore archaïque tropicale, un peu comme si elle n’appartenait pas vraiment à ce monde, toutefois son apparence ne trompe pas le Démon sur sa véritable nature. Les dessins des muscles, la prise ferme et à juste niveau autour de son pommeau, la disposition de ses doigts autour du manche, la force avec laquelle elle écarte sans peine ronces, lianes, buissons et obstacles. C’est une femme d’arme. L’incarnation de la guerre ne comprends cependant pas d’où elle vient, ses vêtements ne sont pas reconnaissables d’un quelconque endroit, et de ce qu’elle voit il n’y a pas de tatouage reikois ostensible. Elle allait de toute façon bien vite en savoir plus, lentement, subrepticement, l’épée maudite s’introduit dans l’esprit de sa nouvelle manipulatrice. Elle prends son temps pour fouiller avec précaution, prenant soin de ne pas investir ses pensées de manière trop brutale afin de ne pas éveiller son attention. Tandis que ses tentacules psychiques rampent dans les méandres de sa mémoire à la recherche d’informations, elle ressentirait une simple céphalée, voir plus si elle était réceptive. Si elle était elle même dotée de capacité psychique Violence s’en rendrait compte bien assez tôt également. Là. Dans les souvenirs encores frais. Des fragments d’âmes où elle se bat, analysant brièvement le style de sa porteuse et croissant cela avec les réminiscences de son passé, le Démon observe, intéressé, les visions des affrontements récents. Elle avait eu l’occasion de croiser quelques fois des combattants privilégiant les fouets mais n’avait jamais été elle même cette arme invertébrée, cette expérience promettait d’être… inédite. Violence module sa forme d’arme, procédant à désarticuler sa lame, altérant la nature même de sa matière pour obtenir un matériau plus souple mais tout de même résistant, sa pointe disparaît, son pommeau devient légèrement malléable également, s’ornant pour visuellement obtenir une forme pensée sur mesure pour celle qui elle le savait maintenant, est une mercenaire. Son arme de rêve maintenant dans les mains, il ne restait plus qu’une seule étape à conclure. Elle se battait généralement à deux armes, le Démon allait lui exaucer son souhait. Se rétractant de la mémoire de sa cible qui commençait tout juste à réagir à sa métamorphose, elle envahit à présent sa conscience en parlant dans sa tête par télépathie, utilisant sa voix démoniaque gutturale et rauque qui donnait l’impression de résonner dans le crâne.

    ”Abandonne moi tes veines, et je te donnerai une dague de parade adaptée, et une puissance que tu ne te connais pas.”
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  • Dim 2 Avr - 2:24
    La suite du trajet devient… étrange.

    D'abord un mal de crâne, dont la source lui est inconnue. Capella se demande si elle ne commence pas à pâtir des différents climats de la surface - elle n'avait jamais été particulièrement sujette aux migraines, et ne voyait pas vraiment d'autres explications. Qu'importe, après avoir fait son travail, elle pourrait aller se reposer dans le Lac Rebirth qui n'était pas trop loin de sa destination.

    Le pire reste à venir. L'épée qu'elle a ramassé sur le cadavre commence à se… tortiller ? Elle regarde sa main et se demande si c'est juste une impression, pour à la place voir sous ses yeux l'épée changer de forme, de façon presque organique, et devenir un fouet. Curieux phénomène, mais pratique, se dit-elle. Voilà qui vient d'augmenter sa valeur sur le marché. Il doit y avoir un tas de chercheurs en magie qui voudraient pouvoir étudier un tel objet. Ses réflexes prennent le dessus, et elle ne peut s'empêcher de tenir plus fermement le fouet magique, et de faire quelques mouvements du poignet pour savourer le confort de cette prise en main.

    Pendant qu'elle essaie de deviner combien de pièces d'or elle pourrait tirer de sa nouvelle arme, une voix envahit ses pensées. Une voix sombre, grave. Capella s'arrête net et adopte une posture défensive, le fouet paré devant elle, l'autre main prête à dégainer son arme à sa gauche (son fouet habituel). Son regard parcourt les environs avec attention - qui est là ? Elle a beau chercher, elle ne voit personne.

    Le plus probable est qu'un mage a envie de jouer au petit farceur. Doué de télépathie, peut-être d'invisibilité ? Elle ferme les yeux pour mieux entendre les bruits qui l'entourent. Pas de bruits de pas, ni de respiration… Là ! Un mouvement suspect, et sa main droite réagit à la même vitesse que ses pensées. Le claquement du fouet raisonne, les oiseaux s'envolent, et à terre git un petit animal mort. La sirène siffle d'agacement, et ne prête aucune attention à ce qui devait ressembler autrefois à un singe, et ressemble maintenant juste à une boule de poils ensanglantée. Tant pis pour toi, stupide créature. Tu n'avais qu'à être au bon endroit au bon moment.

    Bon, il va falloir prendre les choses en main, et tirer le farceur de sa cachette. Capella décide de jouer le jeu, bien qu'elle reste prête à frapper, pétrifier, ou torturer mentalement la moindre apparition.

    - Mon sang a bien plus de valeur que ça. Viens me parler en face à face et fais-moi une meilleure proposition, tu veux ?

    Elle parle haut et fort, les sourcils froncés, bien décidée à en découdre.

    - Je négocie pas à l'aveugle. Bouge-toi.

    Le pire à ses yeux n'est pas tant d'avoir subi une intrusion dans son for intérieur, mais de ne pas pouvoir empêcher la prochaine. D'être obligée de rester plantée là, en attendant de trouver qui veut jouer avec elle, pour mettre fin à sa lubie ici et maintenant. De prendre du retard sur sa mission alors que son contact lui avait précisément demandé de prendre en otage une famille entière avant de s'en "occuper" d'une manière bien précise ; de perdre du temps sur ses préparatifs.

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  • Dim 2 Avr - 19:29


    La forme que le Démon avait adopté était basée sur sa lecture de l’esprit de sa porteuse, c’était effectivement la première fois qu’elle se transformait en fouet, mais elle en connaissait déjà les spécificités et les nécessités mécaniques pour les avoir puisées dans les connaissances de sa victime. Une arme sans lame, flexible mais suffisamment ferme pour pouvoir conduire la tension en tournoyant, maniable, à l’équilibre encore plus délicat qu’une épée, il faut que le poids soit tout juste suffisant pour pouvoir maximiser l’inertie de la queue lorsque le manieur effectue ses moulinets sans pour autant être trop lourd et désavantager la rapidité de l’utilisateur. L’arme vivante avait donc opté pour une lanière en chaîne dont les mailles irrégulières étaient parsemées d’une dentition métallique acérée, la queue traîne sur deux mètres et les mailles les plus proches du pommeau sont les moins chaotiques, permettant d’être empoignées par la manieuse pour effectuer diverses prises. La fin du fouet possède également une paire de mailles lisses pour pouvoir être saisie à la main et servir de balancier, l’épine de fin cependant, est une masse à ailettes cornues. Le manche est basé sur celui d’un sabre républicain avec une garde incurvée laissant amplement la place pour les torsions du poignet, une fleur de métal au centre duquel un crâne repose orne le bas du pommeau et le manche en lui-même est en cuir souple rouge et sinueux similaire à des veines enchevêtrées. Lorsque sa manipulatrice fait claquer les chaînes et perce le mur du son avant d’éventrer un animal tropical, les viscères se répandent au sol, la bête tombe morte net sur le coup. Cette forme est furieuse, elle est impatiente de goûter à une chaire sentiente.

    Maintenant que sa présence est perçue, il n’y a plus besoin de prendre de pincettes, Violence s’insinue plus brutalement dans l’esprit de sa victime, plonge à l’intérieur de la femme et comme un animal sauvage en cage saccage tout sur son passage. Elle arrache les fragments d’âme pour pirater les informations à sa cible, elle fait ressurgir des évènements, doux, désagréables, heureux, atroces, elle cherche les bras de levier qui lui permettraient de convaincre son hôte de s’adonner à la voie du sang. Le Démon s'immisce dans chaque recoin de sa tête, provoquant un tourbillon de pensée à son hôte pareil à visionner toute sa vie juste avant une mort imminente, Capella, elle a un frère, ses tentacules psychiques saisissent la psychée de sa proie, l’immobilise tel un prédateur en chasse pour jouer avec, Kaizoku. Une contrée que Violence ne connaît pas… pour le moment. Elle continue de violer l’intimité mémorielle de sa cible, découvrant les pensées qui ne sont pas les siennes, lorsque finalement, elle perçoit une trace. Un fragment d’âme qui n’est ni à cette Sirène, ni au Démon du Chaos.

    ”Tu me comprends, toi aussi. Nous faisons partie l’un de l’autre.”

    La Sphère virtuelle se déforme de plaisir, sa soeur a touché ce mortel, elle y a laissé la marque du Songe et tout comme Petit Ange, sa force résiduelle garde cette rêveuse. Elle suit les enseignements d’un Démon et connaît sa joie absolue, ce qui signifie, ce qui signifie que ãz§ÖIMAGINEû¶ÇzCE QU’ELLE/¦­Ìc\ã—0ŽPOURRAIT FAIRE ÝãÝYó9»úPOUR LA VIOLENCE¨ïãy>®Êã˜. L’incarnation de la brutalité trépigne d’impatience, elle a hâte de corrompre une nouvelle proie et de la transformer en bourreau au service de sa soif de cruauté. Mais tout d’abord, usant de sa voix physique empruntée aux damnés qui la constitue, elle prononce dans un bruit rauque émanant de sa forme d’arme:

    ”Tu es marquée par le Rêve. Il y a une partie de Songe en toi, et une partie de toi dans le Songe. Il y a aussi un peu de Violence en toi, et un peu de toi, en moi.”

    Le fouet démoniaque commence lentement à se transformer, au dessus du point d’équilibre de la main, là où la garde rejoint le cuir, un anneau creux en métal argenté se forme dans le manche pour accueillir une sphère de pure essence de Violence. Les volutes de fumées noires comme de l’encre s’accumulent jusqu’à former une orbe totalement opaque tant la profondeur de sa couleur est dense, de cinq ou six centimètres de diamètre, une fine aberration chromatique enveloppe le tout, distordant la lumière en reflets oranges et bleus. Violence fixe Capella via cette version miniature improvisée, elle examine celle-ci, la dévisage attentivement. Ses ambitions. Sa soeur Rêve lui a prêté les envies d’une conquérante, mais le Démon de la cruauté n’y voit qu’une cupidité sans limite. Au milieu de cette appât pour le gain, il y a cependant autre chose qui supplante cette soif d’or, sa foi. Violence se fiche des Titans, des Gardiens ou des entités divines de Sekaï, elle se fiche également de savoir si elle même est quelque chose de particulier dans ce monde, ou de simplement bénin. Ce qui l’intéresse c’est une tâche simple, directe, brutale et abjecte. Déchaîner les mortels dans un déferlement de sauvagerie meurtrière.

    ”Tu suis la voie du Fantasme, laisse moi t’ouvrir à celle du Chaos.”

    La Sphère noire s’écarte de l’anneau, flotte dans les airs devant Capella et semble grossir d’un seul coup, des centaines de filets obscurs se faufilent de l’environnement pour rejoindre l’orbe statique en hauteur. Ils sortent des ombres, derrières les arbres, sous les feuilles des buissons, ils sortent des yeux et de la bouche de la mercenaire elle-même. Ils virevoltent dans une danse macabre et intimidante pour le commun des mortels, mais la sirène n’est pas n’importe qui, la Sphère absorbe les rémanence de fureur ambiante et atteint sa taille naturelle, autour d’elle se matérialise alors lentement des particules de métal grandissantes qui prennent la forme d’une armure à l’acier étrange, comme s’il résultait de la fusion entre l’homme et le fer. Les épaulières s’ornent d’une couronne de bras qui se tendent vers le ciel, espérant trouver quelque chose à attraper, criant silencieusement à l’aide ou souhaitant se venger d’être emprisonné sur le corps de cette abomination de la nature. La créature titanesque de plus de trois mètres de haut se dessine devant elle, arborant des failles sur sa protection qui laissent entrevoir au sein de la coque d’épaisses volutes de fumées, chacune renfermant un souvenir millénaire prit au piège dans son être. De très fines plaintes s’échappent de temps à autre et hurlent étouffées leur souffrance éternelle. La Sphère trône là où reposait autrefois une tête, et le bras gauche de cette engeance démoniaque tient du bout de ses doigts de géant la chaîne de l’arme maudite. Ses jambes écartées et plantées fermement dans le sol écrasent les malheureuses fougères des trois cents kilos d’acier, de chair et de haine, l’abomination se penche sur la Sirène, la domine de sa taille, le néant noir se rapproche de son visage, dans l’encre insondable, des perturbations apparaissent, des couleurs surgissent et des reliefs se dessinent pour s’accaparer une apparence satirique du Prince Voyageur, en guise des yeux, deux trous béants occupent les orbites, pleurant des larmes noires qui s’écoulent sur les joues aviaires et repartent se plonger dans le puit d’ombre de la Sphère. Soudain, ce visage factice se déchire en deux à la verticale, laissant apercevoir l’intérieur de la boule d’essence, des visions de mort et de torture y prennent place, défilant les souvenirs des défunts accumulés sur les siècles des siècles comme un livre feuilleté à toute vitesse.

    ”Capella Tiamat, est-ce que tu crois connaître la Mort?”
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  • Mer 5 Avr - 5:01
    Le mal de tête revient en force, au point où Capella vacille, et prend appui contre le premier arbre que son dos trouve. Sa vision se trouble et se constelle de formes abstraites, et tout son corps s'engourdit alors qu'elle perd le contrôle de ses pensées. Impuissante face à l'intrusion psychique qu'elle subit, elle ne peut le percevoir que comme une attaque en réponse à sa provocation : un mage noir ? Elle se concentre autant qu'elle peut pour rester droite, et pour ne pas hyperventiler. Garder le contrôle, c'est tout ce qui compte.

    La voix revient. Marquée par le rêve ? Le Rêve ? L'affirmation sur la violence en elle ne l'intéresse pas, mais le fait de reconnaître son prophète dans les mots d'un autre ne peut que l'aider à revenir à elle. Mais cette fois, la parole ne résonne pas seulement dans sa tête : elle semble venir… de l'arme magique. Capella baisse les yeux vers l'objet, circonspecte, et se demande s'il existe des enchantements qui permettent de communiquer de la sorte. La question ne se pose pas longtemps : ce qu'elle fixe se transforme sous ses yeux, et elle échange maintenant avec une sphère d'ombre.

    La voie du Chaos. La cultiste ne comprend pas le rapport, tout est décousu. Mais si son vis-à-vis a aussi rencontré le Rêve, elle veut bien lui laisser une chance. Au moment où elle formule cette pensée, les Ombres semblent manifester leur volonté.

    S'érige alors devant elle une figure triomphale - non, majestueuse - non, divine. Les yeux de la jeune mercenaire brillent de milles feux, elle est bouche bée, et ne peut honorer cette glorieuse apparition que par son humble regard. Elle se hisse sur la pointe des pieds pour mieux admirer le cadavre exquis de membres et de métaux. Dans l'abysse qui la contemple en retour, elle reconnaît son gardien. Son visage, jusque là méfiant puis surpris, se détend alors d'un coup. Devant le spectacle de la Mort, elle est complètement rassurée. Sereine.

    - Non. Je l'ai rencontrée une fois, mais j'ai oublié… Mais même si je ne connais pas la Mort, c'est mon rôle de la servir, tout comme je sers le Rêve.

    Elle sourit.

    - Je pensais parler avec un potentiel ennemi, mais je me suis trompée. Je suis honorée de rencontrer en personne un autre Gardien des Ombres.

    Bien sûr : si les Ombres les ont réunies, si cette apparition a perçu le Rêve qui l'anime, si cet être connaît l'autre parent des Gardiens et l'aborde, tout cela ne peut pas être innocent. Ce n'est pas un monstre anodin : c'est forcément un Gardien. Capella est très fière, de pouvoir être témoin de sa présence sacrée. Elle s'incline légèrement avant de poursuivre.

    - Parle-moi de la voie du Chaos. Je veux t'écouter. Ma mission peut attendre encore un peu.

    Bien sûr, elle n'oublie jamais l'argent. Mais la possibilité d'apprendre de cet échange est trop importante - sainte, même - pour ne pas prendre le temps d'y participer.

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  • Jeu 6 Avr - 1:13


    Un Gardien, un nom que Violence connaissait pour l’avoir lu maintes et maintes fois dans la tête des hommes. Si elle s’était présentée en abordant le sujet de la Mort, c’était avant tout parce que sa dernière lecture spirituelle lui avait montré la foi que vouait cette petite sirène à sa soeur juste parce qu’elle semblait la méprendre pour une incarnation des Gardiens. Enfin, méprendre, Violence ne savait pas réellement s’ils étaient oui ou non liés aux entités divines en tant que Démons, leur nature était diverses, insaisissables et changeantes, au final la question de savoir d’où ils venaient dans Sekaï n’importais que peu en comparaison de celle qui demandait où il allaient. C’était là la véritable importance à leur propos, leurs intentions. Si l’incarnation de la brutalité n’était pas tout à fait certaine de celles de sa soeur onirique, c’est parce que celle ci semble régulièrement se poser en tant que simple spectateur curieux de la Réalité. Elle se contentait souvent de regarder sans intervenir dans les déboires des mortels, sauf dans quelques cas spécifiques où elle avait l’air de choisir ceux dont la destinée possédait un certain potentiel. Pour sa part, Violence avait un but clair, chaotique au possible, mais clair. Le Chaos. Par rapport aux Gardiens, il était évident que le Prince Exilé tenait du Rêve oui, mais dans son propre cas, elle ne savait pas encore très bien si elle était affiliée à la Mort ou au Chaos, pourtant elle ne se souciait pas de le savoir, les souvenirs de cruauté engendrés par les actes malins la satisfaisaient et lui apportait une agréable paix qu’elle savait toujours savourer, donc elle perdait rarement son temps en introspection à aller chercher plus loin.

    En ce qui concerne la sirène devant elle, elle peut tout à fait rester dans l’illusion dont elle se berce toute seule. Cette sombre idiote aveugle semble croire dur comme fer qu’elle parmis tout les mortels a été choisie par les Gardiens pour témoigner de leur apparition terrestre, qu’il en soit ainsi, Violence se fiche d’être vénérée, par contre, elle doit reconnaître qu’avoir des fervents croyants possède bien une utilité des plus pratique: les plus extrêmes feront n’importe quoi pour aller jusqu’au bout. Pendant la guerre contre les titans elle avait témoigné de multiples formes de fanatismes, allant de la vénération à la férocité dont elle se régalait, à la haine irascible envers leurs tortionnaires divins, et à chaque fois ce qui avait toujours épaté le Démon était le frénétisme inarrêtable avec lequel les aveugles se jetaient corps et âme dans leur quête. Ce même Démon avait lu dans Capella, et ce qu’il y avait vu se rapprochait agréablement de cette foi.

    ”Il n’y a pas de chemin vers le Chaos, parce qu’il est déjà partout, il suffit de l’accepter pour le laisser fleurir…”

    Faisant un pas de plus vers la jeune femme, la dominant jusqu’à ce que l’armure putréfiée projette son ombre sur son visage, Praelia se plie en deux afin que la Sphère ne réside qu’à quelques centimètres de la tête de Capella, celle-ci tient toujours le manche du fouet maudit dans sa main, permettant au Démon de continuer à lire dans son esprit, il puise dans la psychée de la femme, allant chercher les paroles qu’elle désire entendre, l’engeance démoniaque réponds à son fantasme pour l’envoûter.

    ”Capella Tiamat, les Ombres t’ont avalé puis elles t’ont recraché dans Sekaï, t’es tu jamais demandé ce que ton âme a fait pendant ce séjour dans l’Outre-Monde? Pourquoi ton âme aurait-elle refait surface dans la réalité?” De sa main libre, Praelia soulève le menton de la sirène avec une douceur dont elle fait rarement preuve au contact de mortels. Sa voix physique renforce son aspect intimidant et spectral et adopte un ton biblique, presque cérémonieux. ”Tu as entendu quelque chose, une voix te parler dans le Royaume de l’Au-Delà, cette voix t’as intimé un ordre, elle t’as confié une mission. Tu n’es pas notre championne, car tu nous as oublié, mais ce n’est pas grave, je suis là pour te le rappeler. Ta mission peut attendre, mais ta Mission, celle avec un grand ‘M’, celle là t’appelle petite sirène, tu ne dois pas la faire attendre.”

    Soudain, l’apparition s’évanouit.

    Praelia a tout simplement cessé d’exister, provoquant un léger appel d’air devant la masse colossale qui a disparu en un instant, dans la main de la républicaine demeure encore le fouet maléfique, son poids s’ajuste de plus en plus à la prise et à la masse musculaire de sa porteuse au fur et à mesure que le temps s’écoule. À l’intérieur du pommeau, la pseudo Sphère a disparu pour rendre sa forme originelle à l’arme sur-mesure. Si ce n’était pas pour les traces de pas de l’armure démonique au sol qui témoignaient encore de sa présence tantôt, la sirène aurait pu croire à une hallucination ou à un malaise dû au climat tropical. L’humidité lourde et la chaleur crée par la canopée aurait été infernale pour bien des mortels non-habitués aux temps extrêmes mais pourtant la petite sirène semble au contraire apprécier son environnement. Le Démon lui laisse une petite dizaines de secondes pour encaisser ce qui vient de se produire, puis reprends dans son esprit:

    Lorsque tu es morte une première fois, nous t’avions dit une chose, un ordre, une mission. En te laissant sortir du Royaume du Chaos et de la Mort, nous t’avions demandé…

    DE LES RAMENER AVEC TOI.


    Un moment de silence se dessine au milieu des arbres et des palmiers, les oiseaux ne chantent plus, les insectes sont muets, le vent même s’est arrêté un bref instant tandis que les nuages au dessus d’eux se gorgent d’électricité, prédisant l’orage tropical diluvien qui se profile dans les prochaines heure. La nature elle-même redoute ce que Violence susurre à l’oreille de son nouveau héraut:

    IL EST TEMPS D’ACCOMPLIR TA DESTINÉE. APPORTE VIOLENCE ET MORT AUTOUR DE TOI.

    Les cieux se déchirent, le tonnerre tremble et son rugissement se répercute dans les airs, faisant écho contre les troncs des arbres et la flore impraticable de la jungle, ce hurlement électrique se mêle à la voix du Démon, appuyant sa condamnation. Le vent se relève et déferle dans les feuilles de palmier, la pluie tonitruante s’abat sur la canopée, perçant ça et là sa coquille protectrice. Les éléments se déchaînent au même moment où la voix télépathique pose une nouvelle question fatidique à celle qu’elle a entiché de sa mission destructrice:

    Enfant, en devenant un instrument de la Violence, à quel point es-tu prête à lui abandonner ton corps?
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  • Mar 11 Avr - 4:37
    Le terme est plus qu'approprié : Capella écoute la voix religieusement. Pleinement attentive, elle laisse les mots guider ses pensées, toute garde baissée. Là où le Rêve l'avait tendrement amenée à lui, la Mort (la Violence) n'a aucun effort à faire pour la corrompre. Dans son essence même, la sirène avait toujours été corrompue. Cette rencontre était déjà écrite avant même qu'elle ne se réalise, comme toutes les plus grandes prophéties. C'est ce que ressentait Capella, qui contemplait la mort qu'elle avait oublié, la vie qu'elle avait retrouvé, et l'appel du vide entre les deux.

    Un clignement d'œil, et le Gardien disparaît. Non ! Il doit lui donner sa Mission ! Pendant dix longues secondes qui traînent comme des siècles, elle cherche du regard autour d'elle. Était-ce un rêve ? Une vision ? Puis la voix qu'elle attendait, celle qui effraierait tout le monde mais qui la rassure tant, revient dans ses pensées. Ramenée à la réalité de force, elle constate que le fouet magique a retrouvé sa forme. La forme qu'Il a choisi pour Elle, pour la Garder.

    Les nuages épais et sombres, et le feuillage dense de la végétation qui l'entourent, forment les Ombres au sein desquelles son esprit accueille avec joie l'épiphanie. C'est donc pour cette raison qu'elle a été réincarnée !

    Pour tuer.

    Ses yeux vairons, si emblématiques de sa première renaissance, brillent d'un éclat intense alors qu'elle renaît à nouveau. Le ciel craque et tonne, et sous les trombes d'eau que sa peau accueille avec délice, Capella est pleinement euphorique. C'est pour ça qu'elle s'est toujours plu dans ses croyances, ou surtout, dans la version personnelle de celles-ci qu'elle pratique. Parce qu'elle a toujours su que le rêve et la mort ne ferait qu'un. Son âme déjà noire de vices s'assombrit encore, maintenant qu'elle s'offre à la Violence. Mais tout ça n'est que logique : n'est-elle pas censée massacrer le Nouvel Ordre ? Et hors de sa Mission Sacrée, restent les missions qu'elle accepte sans aucune forme de discernement : tuer, faire souffrir, n'a jamais été qu'une occupation comme une autre pour la mercenaire.

    Elle a été comprise, et a compris en retour. Le Gardien a repris sa forme d'arme pour qu'elle continue d'avancer. Il est temps d'accomplir un sacrifice digne de sa présence, à la hauteur de son intervention, qui correspondra à sa volonté. Elle fait un pas en avant, puis deux, puis trois - le temps de retrouver pleinement son équilibre, toujours mis à mal par la douleur qui transperce son crâne, bien qu'elle commence à s'y habituer. Quand elle retrouve enfin son rythme de marche, elle répond au Gardien d'une voix claire et ferme, le regard fixé sur l'horizon.

    - La violence m'appartient autant que je lui appartiens déjà pleinement. Tu l'as dit, je suis revenue pour être son instrument. Mon corps existe pour servir les Ombres.

    Sans s'en rendre compte, peut-être parce que les ténèbres prennent de plus en plus de place dans le ciel qui gronde et dans son cœur aveuglément dévot, Capella continue dans la langue du mal - le bas-parlé. Le Gardien comprendra, comme il l'a toujours comprise.

    - [Mon corps t'a toujours appartenu.]

    Ses pieds s'enfoncent dans la boue, et ses cheveux collent à ses joues. Marionnette de la Violence, est-ce encore elle qui guide ses propres pas ? Posez-lui la question et elle ne répondra même pas. C'est évident, non ?

    Tout lui appartient.

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  • Mar 11 Avr - 11:21



    Le Démon en lui-même n’est pas capable de parler toutes les langues, il est le résultat de l’accumulation de souvenirs fabriqués au fil des siècles, ainsi s’il a pu apprendre des langues répandues comme le Commun, l’Elfique et le Divina, les langues plus rares comme le Bas-Parlé et le Shierak Qiya lui échappent. Pourtant elle n’a pas besoin de comprendre les mots pour lire dans l’esprit de son hôtesse et y voir ses intentions se manifester, même formulées dans une autre langue il lui est aisé de s’insinuer dans sa psychée et d’y voir sa soumission totale, son abandon d’elle-même à ce qu’elle pense être sa divinité.

    Violence est satisfaite.

    Grâce au consentement de sa cible, ses tissus organiques s’offrent à elle d’eux-même, elle n’a aucunement besoin de forcer son intrusion dans ce corps désormais à son entière disposition. L’engeance démoniaque commence par le plus important. La peau des doigts. Elle liquéfie le derme sur l’intérieur des doigts de Capella et fusionne celui-ci avec le manche du fouet, l’empêchant de relâcher sa prise sur l’arme qui la prends ainsi en otage. Ce n’est pas comme si elle s’attendait non plus à ce que la mercenaire l’abandonne, à la vue de ce qu’elle percevait dans son esprit et son coeur elle n’avait pas l’air de quelqu’un qui la jetterait dans une marre à la première occasion, et pourtant c’était toujours l’habitude première que le Démon opérait sur ses proies, donc celle là ne ferait pas exception. Ensuite, ensuite, eNSu1te ENSUITE ENSUITE ENSUITE
    Violence doit se calmer, pas encore, elle ne peut pas se laisser gagner par l’excitation qui monte en elle devant tant d’entrain à la servir, sa soeur avait raison, il y avait des humains qui existaient pour suivre leurs enseignements mais ce qu’elle avait oublié de préciser était qu’ils n’étaient pas les seuls à connaître le plaisir absolu en faisant ainsi, c’était également une grande joie pour leurs pseudo-dieux. Prochaine étape, un peu de concentration, la procédure de fusion était tout de même délicate et nécessitait la concentration du Démon, après tout, il n’était pas sans risque de manipuler les tissus organiques de sa manieuse, et il était en plus contre-productif pour l’incarnation de la Guerre de l’estropier par accident, voir même de la tuer, vu qu’elle s’apprêtait à prendre le contrôle de quelques artères. Palmaire profonde. Radiale. Brachiale droite. Axillaire. Subclaviaire droite. Crosse aortique. Une fois arrivée au coeur, elle décrit le chemin inverse à gauche du corps, les corps féminins sont d’habitude plus délicats à manipuler que ceux des hommes, mais celui de Capella est différent, les paroies de son système sanguin sont conçus pour résister aux pressions sous-marines et pour pouvoir s’adapter à la pression des abysses, elles sont encore plus fines et souples, dans un tissus pourtant plus élastique et donc, plus résistant. Dans le bras translucide de la mercenaire où seul son os est visible, les vaisseaux sanguins corrompus font également leur apparition progressive en partant d’au-dessus du coude, au fur et à mesure qu’elles se teintent du noir démonique elles finissent leurs courses en arc de cercle autour de l’os palmaire gauche. À ce stade, l’artère développe une excroissance solide qui se mêle à la peau, ressortant à l’air libre, depuis ce nouveau point d’ancrage, Violence dote son hôte d’une arme secondaire, transportant la matière à travers son réseau sanguin piraté pour forger une dague de parade au pommeau similaire au fouet, à l’exception que la lame est incurvée finement et possède deux crans afin de pouvoir raccrocher armes, troncs, branche et tout autre chose au besoin.

    Bien.

    Ce qu’elle était capable de produire avec la corruption était limité. Le temps est un facteur clé. La compatibilité avec sa proie aussi, lorsque Violence s’entiche d’un nouveau corps, elle manipule les gènes mêmes de son hôte en les altérant de sa magie disruptive, les cellules organiques sont souvent réfractaire à ce processus, d’où l’importance de la temporalité, comme une tumeur, le Démon fatigue la chair avec un assaut perpétuel, et obtient chaque cellule à force de persévérance. L’abandon mental de l’hôte permet de s’emparer plus vite de la chair et facilite énormément son travail, mais il demeure tout de même une certaine résistance qu’elle ne peut contourner. Si la cible est consentante, le travail est accéléré, si la cible présente une forte compatibilité, il en est de même. Celle de Capella n’est pas hors du commun, mais légèrement supérieure à la moyenne, permettant donc au Démon, malgré qu’elle ne vienne de poser sa main sur elle que depuis une dizaine de minutes, d’opérer à des changements plus profonds. C’est ainsi qu’en reprenant sa marche, Violence continue son chemin en partant du coeur de la Sirène, montant jusqu’au cerveau, et descendant jusqu’à ses reins pour se séparer et continuer vers les pieds. Arrivée en bas, la chair des chevilles se distort, se scinde dans un éclat sanglant et les jambes de Capella se subdivisent. Son tibia et son péroné se désolidarisent l’un de l’autre, le dernier s’allonge légèrement et développe une spatule incurvée, tel une excroissance osseuse souple qui vient se placer sous sa cheville. La plaie se ressoude, les vaisseaux se réparent et le saignement cesse, mais les jambes déformées ne sont pas encore dans leur état final. Au niveau de l’articulation des genoux, les changements suivent également pour s’adapter à cette nouvelle morphologie, et la patelle se détourne pour arriver dans les mollets tandis que Violence réagence les tendons de l’articulation pour les inverser totalement à l’instar d’un prédateur féral. Le bassin iliaque n’est pas en reste non plus, il faut aussi donner plus d’amplitude arrière aux mouvements possible. Maintenant pourvue de ses nouvelles jambes optimisées pour la course et le saut, le Démon reporte son attention sur le crâne fraîchement atteint de la Sirène. La manoeuvre est délicate, s’insinuant avec finesse entre la cavité sinusale et le globe oculaire de sa victime, la trace de corruption s’immisce dans l’orbite gauche, les cellules flétrissent en cédant au Démon, l’oeil à la pupille rouge lui-même crève et se rompt, provoquant des larmes éphémères de sang sur le visage autrement immaculé de la républicaine. Lorsqu’elle redresse la tête après avoir encaissé la douleur, son regard lugubre est partagé entre sa nature abyssale, et les abîmes de la Sphère noire de pure essence démoniaque qui trône désormais sous les paupières. Si l’oeil a disparu en surface, le fond de la rétine demeure toujours, connecté à cette orbe d’ébène immatérielle et transmettant les informations au cerveau, Violence n’a fait que pirater le nerfs oculaire pour en détourner l’usage, sans le détacher. Sa porteuse peut maintenant distinguer les flux de mana dans l’air grâce à la senseur magique du Démon. Voir comme elle voit. Voir la cruauté. Voir, Sekaï.

    À quelques kilomètres de leur position, la cible initiale de Capella supervisait le bon fonctionnement du campement de raffinage. Les pas de Dagda arpentaient les rangs d’ouvriers, les bottines serrées claquant contre le sol au rythme de l’avancée du syndicaliste. L’orc imposant était le seul à porter un pantalon contrairement aux travailleurs vêtus de tabliers en jute. Dagda n’était pas son nom, juste le sobriquet qu’il utilisait au sein du Syndicat par soucis de sécurité et d’anonymat, sa prestance d’ancien militaire indiquait un passé de vétéran ou du moins une éducation de mercenaire plutôt stricte, les armes à sa ceinture ne ressortaient pas du paysage au milieu de toutes celles portées par les ouvriers, plus rudimentaires et par les membres du Syndic’ qui surveillaient les alentours, plus mortelles. Arrivant devant des rangs entiers de barils en bois de chêne épais et dont les couvercles sont enduits de résine de palmier pour les sceller, il rejoint un servant qui ouvre un des tonneaux pour commencer à en brasser la surface à l’aide d’une passoire à large grille. Dagda regarde le liquide sombre qui sommeille dans le bac par dessus l’épaule du type avec un air inquisiteur. Curieux, il trempe un doigt dans la substance et le ressort, ça colle à la peau, comme de la poix. Les morceaux de feuilles qui macèrent dans la préparation n’ont donc pas encore donné tout leur jus, l’orc frappe doucement l’arrière du crâne de l’ouvrier qui a manqué de précaution.

    ”Celui là n’est pas assez pur, t’as oublié de tester sa texture avant de l’épurer. Passe aux autres. Et te rates pas, si tu pourris un tonneau parce que je suis pas derrière toi on a ni raison de te payer ni raison de te laisser revenir.”

    Il fallait comprendre autre chose dans ses paroles, mais sûrement le crétin serait quand même suffisamment intelligent pour lire entre les lignes. Les quelques gardes du Syndicat proche de sa position se retournent vers lui au son de sa voix, et Dagda leur fait un signe de la main pour leur indiquer que tout va bien. Cette étape n’est pas non plus cruciale dans la fabrication de la drogue mais faire baisser le degré de pureté revenait à vendre la came moins cher, et ça c’était hors de question. Le tambours des bottines reprends, et il continue de toiser la chaîne de production.
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  • Jeu 20 Avr - 15:54
    La douleur n'est pas progressive.

    Elle lui prend d'abord sa main, qui fond et brûle autour de l'arme qu'elle tient. Le souffle irrégulier, la sirène charmée est partagée entre son cœur et son corps. D'une part, elle veut honorer autant que possible tout ce que le Gardien lui offrira. De l'autre, toutes les sensations physiques qu'elle s'est autorisée à ressentir pleinement jusqu'à ce moment de sa vie étaient inhibées autant que possible. Mais lorsque Capella est ramenée à ses principes, aussi peu nombreux qu'ils soient, elle ne fait pas dans la demi-mesure.

    Alors elle s'abandonne entièrement au reste de la présence en elle. Son cœur, son bras. La dague de parade qui lui avait été offerte. Le pire est encore à venir, et lorsque la Violence descend dans ses jambes, elle ne peut retenir un cri effrayé. Elle ne peut pas couvrir sa bouche pour étouffer ses gémissements de douleur, ni cacher son visage déformé par la souffrance. Pourtant, s'il y a bien une torture qu'elle connaît, c'est celle de la transformation de ses jambes - mais ce n'était pas la transformation à laquelle elle était habituée. Après être montée dans les aigus alors que ses os éclataient soigneusement, sa voix se brise à son tour. Elle hurle toujours - mais sans son. Elle a du mal à rester consciente, et à distinguer le reste des sensations qu'éveille son Gardien, à son grand dam. Mentalement épuisée, elle ne tient debout que parce qu'il l'y aide par sa présence.

    Son regard vide vient être habité aussi par la présence sainte. Capella est trop engourdie par le supplice des transformations d'avant pour vraiment percevoir la dernière qui lui est offerte. Elle ne peut que constater le résultat : son regard sur le monde a changé. Elle se fige, les muscles encore agités par de légers spasmes de douleur résiduelle, et tourne la tête lentement autour d'elle pour apprécier dans son entièreté le présent des Ombres qui s'est offert à elle. Une meilleure attaque. Un corps plus optimisé. Une perception améliorée. Elle inspire, puis expire un grand coup. Sa respiration revient petit à petit à la normale.

    - Merci de m'accompagner dans ma destinée.

    Dans sa voix éraillée, brillent de milles feux sa fierté et sa gratitude mal placées. Elle remercie la Violence comme elle a remercié le Rêve : avec cette sincérité enfantine dont elle se montre si rarement capable. Après ces quelques mots, Capella s'élance et file à toute vitesse à travers la jungle. Plus rien n'est capable de se dresser sur son passage. Les obstacles sont tranchés par la dague, déchiquetés par le fouet. Ses nouvelles jambes lui permettent de courir bien plus vite qu'avant, et de sauter plus haut et plus loin. Elle se sent étrangement plus légère, alors qu'elle sent bien qu'elle ne l'est pas dans l'amortissement de ses pas : est-ce l'exaltation de la reconnaissance, ou l'être qui Garde son corps ? Le suppôt démoniaque ne s'attarde pas sur la question, et continue de fendre la faune et la flore jusqu'à sa cible.

    La mission avec un petit m lui permettrait de faire la transition vers Celle avec un grand M. Contractée pour torturer un orc et sa famille, par un rival voulant "envoyer un message" à la concurrence, l'intervention divine de la Mort avait légèrement modifié ses plans. Sa cible avait été promue de simple défouloir à sacrifice - ce qui ne serait pas pour déplaire à son client, quelque part. Et même si ça n'avait pas été le cas, la mercenaire ne serait pas revenue sur la promesse à laquelle la Violence l'avait rappelée. Sa quête de richesse n'avait jamais été son seul précepte : elle avait toujours montré une dévotion infinie envers la volonté des Ombres. Sa dernière obligation morale, le bien-être de son frère, n'était pas non plus une inquiétude ici. Elle savait que son jumeau serait fier d'elle, et un peu jaloux - la même chose qu'elle aurait ressenti s'il avait été à sa place.

    Moins d'une heure après sa rencontre si spéciale avec la Violence, elle aperçoit le village dans la jungle et les palissades qui l'entourent. Capella se cache derrière un arbre, et insuffle lentement du mana dans son corps. Sa magie, aussi sombre que son esprit, exprime la même chose que lui : la volonté presque timide de montrer son potentiel. Elle enrobe avec tendresse son corps transformé, sans se mélanger à celle du Gardien pour ne surtout pas le déloger. Et avec un sourire ému, la sirène difforme devient invisible.

    Elle avance lentement, de façon à ne pas attirer l'attention sur l'herbe et la boue écrasées par ses pas. Entre deux maisons, elle aperçoit au loin un jeune être verdâtre - un demi-orc. Une piste à suivre. Son instinct de squale ne laisse pas de place à l'hésitation : c'est un signe, c'est un indice, alors elle va dans sa direction. En se rapprochant, elle voit que c'est un adolescent, doté d'un mana aux teintes encore faibles. Un enfant qui n'a pas encore atteint son plein potentiel. Il porte sur son épaule un sac rempli d'ignames, et avance avec détermination dans les rues du village. Le sourire de Capella devient de plus en plus carnassier au fur et à mesure qu'il semble se rapprocher de lui. Il a l'instinct des jeunes combattants : il se retourne régulièrement, comme s'il se sentait observé. Puis il arrive enfin chez lui. Une humaine, grande et mince, la trentaine, lui ouvre la porte. Elle tient un bambin endormi dans ses bras.

    La mercenaire ne reste pas pour écouter la mère qui remercie chaleureusement son fils. Elle contourne la maison, et compte les issues. Une porte au nord, une autre à l'est. Cinq fenêtres aux volets fermés, pour ne pas laisser la pluie rentrer. Des arbres fruitiers et des buissons aux feuilles qui guérissent. Une machette rouillée plantée dans une souche. Une corde à linge nue, et du matériel de pêche entreposé contre un mur. Une petite maison, et tout le confort que l'argent sale peut fournir à la famille d'un vétéran qui s'est installé au milieu de nulle part pour ses petites affaires.

    Capella défait son invisibilité après avoir passé la porte sur le côté. La gorge toujours irritée par les cris qu'elle a poussé, elle chante avec peu d'harmonie une rengaine de pirate sur la mer et ses caprices impitoyables. Sa voix enrouée se gonfle de magie et le chant de la sirène joue son rôle comme il se doit. Il attire l'attention des résidents, qui tombent ensuite invariablement sous son charme. Même si leurs yeux trahissent la peur devant la présence monstrueuse qui chante pour eux, ni la femme ni les enfants n'ont les talents psychiques nécessaires pour résister à la mélodie qui les ensorcelle. Les voilà entièrement pacifiés. Les paroles de la chanson changent.

    - Bâillonne et attache tes enfants, et emmène-les avec toi dans la chambre.

    La volonté de satisfaire la Capella et la Violence est trop forte pour que l'humaine résiste. Elle s'exécute sous leur regard attentif. La mercenaire cesse enfin de chanter, et s'appuie contre le mur à côté de la porte.

    - Je vous en prie, vous pouvez tout prendre, mais laissez mes enfants…
    - Tais-toi et reste assise.


    La mère se résigne, pensant encore pouvoir sauver ses petits. L'adolescent se débat légèrement, en vain. Le bébé pleure dans son bâillon. Une bonne douzaine de minutes plus tard, la porte d'entrée grince, et une voix masculine retentit dans la maison de bois, annonçant son arrivée. Dagda est rentré.

    Le sacrifice peut commencer.

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  • Ven 21 Avr - 7:53


    Pendant l’impatiente attente de l'arrivée de Dagda, Violence fourmillait à l’intérieur de Capella, elle avait apprécié l’infiltration au sein du foyer, observant toute la scène non seulement depuis sa forme d’arme, mais en plus depuis l’oeil même de son hôte, profitant de son point de vue, ne faisant qu’un avec celle qui affirmera bientôt sa volonté sur ces êtres si insouciants, si innocents et pourtant déjà condamnés. Même si la chanson n’est habituellement pas son répertoire artistique -elle fait plutôt dans le théâtre, plus particulièrement celui de la guerre- elle savoure celle chantée par la Sirène, elle se langours devant l’expression de terreur dans les yeux de la petite famille qui semble comprendre la fatalité de leur situation, mais sans pour autant en capturer toute l’étendue. Ensemble, ils montent à la chambre. Les enfants se débattent, la mère pleure, le bébé aussi. À l’intérieur de l’esprit de la Sirène, une image accapare ses pensées, une vision carnassière d’un sourire de prédateur sortant du noir, puisant dans les peurs les plus fondamentales de l’Homme, ce collier de dents chaotique ressort d’un voile d’obscurité, comme s’il y avait quelque chose dans l’ombre qu’il était impossible de percevoir ni même d’en voir la silhouette, et que seule cette dentition morbide était tangible. La peur de l’inconnue, la peur du noir, du danger non identifiable. LA PEUR DE LA MORT. Cette phrase résonne dans l’esprit de la Sirène. Est-ce que tu ressens leur terreur? Regarde les. Ils vivent dans une illusion Capella, je suis partout, dans le coeur de tout les hommes, ils se bercent dans une complaisance qui n’existe pas, leur Rêve n’est qu’une facétie qu’ils nourrissent dans l’espoir fou d’oublier la Réalité, pourtant qu’ils prennent garde Capella, parce qu’il suffit d’une seule personne, d’un seul moment, d’un seul geste, pour leur rappeler mon existence.

    Ils attendent pendant un bon quart-d’heure, une quinzaine de minutes pendant laquelle l’anticipation de la scène à huis-clos qui va prendre place ici est presque aussi agréable pour le Démon que les souvenirs qui seront bientôt forgés dans cette pièce. La mère a cessé d’implorer la mercenaire, elle comprends qu’il est inutile de demander mercie, à la place elle tente vainement de calmer son chérubin. Ce petit bout de vie, la personnification même de l’innocence selon certains mortels, coupable du pire crime possible pour Violence, l’Existence.

    Tu es venu au monde gamin, tu vas payer, comme tout les autres, si tu deviens un homme, tu commetras des actes vils et infâmes, tu seras brutal comme tout tes ancêtres avant toi, qu’importe que tu payes pour tes pêchés maintenant ou plus tard, tu vas subir, que ce soit maintenant ou après reviendra au même. Tu fais partie du cycle de la haine, engendré par tes parents infortunés tu perpétueras leurs pensées et leurs buts, tu marcheras malgré toi dans leurs pas, d’une manière, ou d’une autre. Plus tard, toi aussi tu auras des enfants, et à ton tour, tu seras prêt à tout pour les défendre face à l’adversité, tu seras prêt à aller jusqu’aux actes les plus barbares et à te livrer aux déchaînements de haine les plus primaires pour pouvoir protéger le fruit de ta chair, ces démonstrations de fureur impétueuses, c’est moi.

    Et toi, la mère désorientée qui fait semblant de ne pas comprendre ce qu’il se passe, tu savais, tu savais pertinemment que ça finirait par arriver, tu fermes les yeux sur la Réalité, sur le travail de ton conjoint, tu vis en croyant bêtement que vous auriez pu échapper à cette fatalité, en t’enrobant dans une bulle protectrice et pourtant factice de croyance absurde, pensant qu’il serait assez fort pour vous protéger de tout. Toi qui a la force de l’âge, tu devrais savoir mieux que personne ici que chacun rencontre un jour plus fort que soi, que la chaîne alimentaire est sans fin, même les Titans finissent par l’apprendre, alors pourquoi croirai tu autrement si ce n’est par négligence fortuite? Lorsque le trépas sonne à ta porte, la faiblesse de ta chair n’est que le résultat de cette toile d’illusions dans laquelle tu t’es allongée avec complaisance, le sang de tes proches qui t’entoure n’est que le prix de ta fainéantise, et la mort de tes entrailles, l’inéluctable amende pour avoir osé vivre et donner vie. Ce désespoir tourbillonnant qui saisit tes tripes tandis que tu balances ton bambin dans ces derniers instants, c’est moi.

    Toi, l’adolescent, le fils à papa, le rejeton modèle qui suit déjà les traces de son géniteur, comme une prémonition vivante de ce que le petit dernier est voué à devenir, tu admires ton père naïvement comme ton héros. Tu le regardes sous le prisme de ton esprit juvénile encore intouché par les atrocités de Sekaï et tu l’encenses, parce qu’il veille sur toi, sur vous, parce qu’il jette derrière lui les miettes de pains que les valeurs qu’il t’as lui-même transmis te poussent à ramasser. Alors toi aussi tu cherches à faire comme lui, à devenir quelqu’un de fort, qui sait se battre pour pouvoir préserver cette bulle enfantine que vous avez bâtis ensemble dans ce petit coin de jungle. Tu es furieux et tu te débats devant l’injustice que ta mère et ton frère sont entrain de subir, mais la Vérité gamin, ce n’est pas que tu es en colère contre Capella, non. Tu ne peux pas l’être, parce qu’après tout, comment le pourrais tu? Ce n’est que l’ordre naturel des choses, les plus forts prévalent, les plus faibles se font écraser et nourrissent les vers. Tu es en colère après toi même gamin. Tu es impuissant, tu cherches quelles erreurs de parcours tu as bien pu commettre pour être aussi insignifiant quand toute ta vie, tout ce que tu aimes est en jeu et que tu sois aussi incapable que ça d’avoir un impact dans l’équation. Cette colère qui t’habites et te donnes envie de prendre les armes, c’est moi.

    Dagda. C’est moi.

    La porte d’entrée émet un grincement qui d’ordinaire, sonne le retour à la vie familiale, c’est un son qui doit sûrement provoquer une réaction pavlovienne chez le gamin, entendre ce bruit serait comme un signal pour dévaler les marches de l’escalier et se jeter dans les bras de son père en voulant lui montrer les fruits de son entraînement au tir à l’arc ou au lancer de hache. Désormais, ce souvenir sonor est teinté à tout jamais, marqué au fer rouge par une trace qui deviendra indélébile.

    TUE LE

    La voix de Violence résonne dans la tête ronde de la jolie blonde. En ce moment même, elle est l’instrument de sa haine, elle est l’Héraut de la Mort. Maintenant il est clair pour Dagda que quelque chose cloche, il a annoncé son arrivée comme il le fait après chaque journée de travail, mais aucun bruit ne lui parvient de la maison, pourtant les affaires de sa famille sont encore là, et de l’eau chauffe dans le pot sur un feu fraîchement alimenté. En bas, les planches grincent tandis que ses pas se font doucement entendre dans un rythme fatal. À côté de Capella, la mère plaque une main sur la bouche de son bébé, espérant vainement permettre au père de ses enfants d’entendre Capella avant qu’elle ne le voit. Pauvre folle, ton fils aura le temps de suffoquer avant qu’il n’arrive en haut.
    TUE LE.
    L’Orbe dans l’oeil gauche de Capella s’excite, l’aberration chromatique qui l’enveloppe et dessine les contours de ses paupières devient de plus en plus distincte, créant deux reflets orangé et bleuté qui dansent avec les battements de coeur de la Sirène, illuminant les larmes de sang séchés qui marquent sa joue tel un tatouage tribal. La vision que la Sphère octroie à Capella détecte les fines traces de mana qui précèdent Dagda, Violence voit le flux de magie qui traverse sa jambe et son torse alors qu’il entre enfin dans leur ligne de vue.
    TUE LE. TUE LA MÈRE AVEC. LAISSE LES JEUNES EN VIE POUR L’INSTANT.
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  • Mar 25 Avr - 10:23
    Pardonne mon insolence, Gardien, car je vais te faire attendre, pense Capella en silence, sans quitter ses otages des yeux. La Violence tressaille en elle, et le contraste entre le sang-froid de la sirène, et la frénésie du démon qui l'habite, pousse la fidèle à choisir ses actions avec beaucoup de soin. Chacun de ses gestes doit refléter la gloire du sacrifice qu'elle s'apprête à offrir aux Ombres. Aucun geste ne sera superflu, aucun mot ne sera déplacé.

    Le bruit des pas s'arrête derrière la porte encore fermée. Il hésite. Dagda sait que c'est un piège. Dagda sent la Mort tapie dans l'ombre. La sirène pose son regard attentif et déformé sur la mère. Qu'elle chante, et qu'il reconnaisse les cris de douleur qu'elle a poussé en enfantant ses ouailles. La cultiste avait secrètement hâte de montrer sa maîtrise de l'attaque mentale à l'être qui l'habite, et c'est sans aucune forme de ménagement qu'elle précipite son mana sur l'humaine.

    Qu'est-ce qui fait le plus mal, quand votre propre esprit devient l'arme utilisée contre vous ? Les traumatismes déterrés par la magie, ou ceux qu'elle y insère ? Cette femme est-elle torturée par ses propres souvenirs, ou par ceux que l'attaque crée en elle ? Capella ne sait pas : elle n'a pas fait ce genre d'études, elle ne se pose pas ce genre de questions. Elle a cependant toujours aimé torturer ainsi. Réduire un être sentient à l'état de loque, par un simple regard. Elle utilise toute la puissance de son pouvoir, et ça y est, l'humaine hurle. Son orc se précipite dans la chambre, et sa bassesse d'esprit prend le dessus : plutôt que de se précipiter sur celle qui attaque sa famille, il se précipite aux pieds de sa femme, et essaie de la raisonner. Il lui dit qu'elle est forte, qu'elle peut résister. Elle s'étrangle en sanglots et plante ses ongles dans son cuir chevelu. Ses larmes, sa morve, sa souffrance détruisent le visage si calme de la femme au foyer si sereine un peu plus tôt.

    La sirène interrompt son flux de magie, et la mère se laisse tomber dans les bras du père, le regard vide. Elle regarde Dagda, dont le visage est déformé par la haine et la rage. Il n'a pas encore attaqué parce qu'il a du mal à appréhender la situation - normal, la Capella devant lui ne ressemble à aucune race connue du Sekai - mais ça ne saurait tarder.

    - Bonjour, Dagda. Tu sais déjà qui m'envoies, et ce que ça veut dire. Malheureusement pour toi, j'ai carte blanche. La seule chose qu'on m'a demandée explicitement, c'est de faire résonner tes cris dans la jungle.

    C'est trop de provocation, trop de menace, trop de prétention ! Il s'élance en avant, les poings serrés… et s'arrête net. Sa peau et son corps durcissent à toute vitesse, et avant que ses oreilles soient atteintes, la mercenaire chuchote, amusée.

    - Les yeux, Dagda. Fallait pas me regarder dans les yeux.

    Pétrifié, il ne peut plus répondre, ni entendre, ni voir. Soucieuse de ne pas utiliser sa magie à tort et à travers, Capella sait que ce sort ne durera que quelques minutes. Ce sera bien suffisant pour éplucher la femme, vers laquelle elle se tourne à nouveau. Les pleurs du bébé et les protestations de l'adolescents deviennent empressés. Papa, maman, sont hurlés sous les bâillons.

    Premier coup de fouet. Le visage brisé par la douleur précédente vole en éclats, accompagné d'un cri glaçant. Les chants de douleur de ceux qui n'ont jamais connu l'agonie ont quelque chose d'apaisant, en soi. Comme si le monde tournait dans le bon sens. Comme si tout le monde finissait toujours par passer par la même chose. Deuxième coup de fouet. Un œil éclate et les cheveux s'emmêlent autour des mailles, dans une giclée de sang. Troisième. Trop de veines sont déchirées, et le futur cadavre gît au sol dans une flaque pourpre.

    Capella se retourne, et son fouet suit le mouvement pour s'enrouler autour de la gorge de Dagda. Les mailles dentées de l'arme, encore encombrées de chair maternelle, se ferment et se resserrent autour du corps pétrifié qui revient lentement à lui-même. Il va pour faire un pas en avant quand il voit le cadavre de sa femme, mais la mercenaire le tire dans l'autre sens. Il parle tout seul, mais elle n'écoute pas. Elle n'est pas intéressée par les regrets, ou la rancœur, ou la peur de cet homme, non : tout ce qui l'intéresse, c'est de l'offrir aux Ombres.

    Il est trop lourd pour qu'elle puisse le jeter à terre, alors elle décide de mettre à profit la dague qui pend à ses veines. Elle la serre de toutes ses forces dans sa main, et la plonge dans le foie de l'orc. Le coup fatal est porté, mais ce n'est pas suffisant. Elle a fait vœu de Violence autant que de Mort. Elle le libère de son fouet pour mieux le frapper, et sous l'impact et la douleur, il épouse le sol. Son sang se mélange à celui de sa femme. Désireuse d'impressionner son gardien, Capella décide d'en rajouter un peu. Elle manifeste une nouvelle attaque mentale sur Dagda, déjà agonisant, presque parti. Debout, devant son œuvre, elle ne peut pas s'empêcher de le faire souffrir un peu plus avant qu'il rejoigne le Royaume des Âmes. Elle veut que la Violence et et la Mort soient fières d'elle.

    Après avoir contemplé avec satisfaction l'agonie finale de sa cible, elle lève la tête vers les enfants. Le gamin s'est pissé dessus. Rien qu'elle n'aie jamais vu. Ne maîtrisant pas la télépathie, elle se contente de parler comme à elle-même, sachant bien que les Ombres l'entendront.

    - Tu veux t'occuper d'eux toi-même ? Est-ce que tu préfères que je te nettoie, avant ?

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  • Mer 26 Avr - 22:20


    QUE LEUR SOUFFRANCE FASSE ÉCHO À TES GESTES.
    QUE LEUR CRIS D’AGONIE SOIT UN AVERTISSEMENT AUX VIVANTS.
    QUE TA SAUVAGERIE FASSE COULER LEUR SANG.


    ”NE REJETTE PAS LA DOULEUR, ELLE EST LA LIBÉRATION DE TA CHAIRE, ELLE EST TA DÉLIVRANCE DE CE MONDE.”

    ”CONTEMPLE AVEC IMPUISSANCE LA TORTURE QU’EST TON EXISTENCE, SENS LA COLÈRE S’EMPARER DE TOI, VOUS AVEZ FAIT VOEUX DE TOUT PARTAGER. SA BLESSURE EST LA TIENNE, TON TRÉPAS SERA LE SIEN.”

    QUE TON FOUET DÉCHAÎNE TOUTE TA FUREUR, C’EST LA RAISON POUR LAQUELLE TU VIS.
    QUE TA MAIN EXÉCUTE SANS PITIÉ, C’EST LA RAISON POUR LAQUELLE TU MARCHES.
    QUE TA CRUAUTÉ SOIT CONNUE DE TOUS, C’EST LA RAISON POUR LAQUELLE TU SERS.


    LA PIERRE EST ÉTERNELLE, ELLE PORTE LA MÉMOIRE DU SANG QUI L’IMPRÈGNE

    ”PLEURE MISÉRABLE, TA DÉTRESSE D’AUJOURD’HUI DEVIENDRA TA HAINE DE DEMAIN.”

    DÉCHIRE LA CHAIRE.


    ROMPT LES CORPS


    DOMINE


    ”À TON TOUR DAGDA.
    RESSENT CE QU’ELLE A SUBIT.
    VIDE TOI DE TON SANG.
    NOURRIS LES OMBRES.
    REJOINT MOI.”


    ”Dis moi quel goût a la poussière Dagda?”

    Alors que l’euphorie du massacre redescend, Violence fait redescendre les émotions de sa porteuse, elle régule précautionneusement l’impétuosité pour ne pas qu’elle s'emballe, habituellement elle ne prendrait pas ces soins, mais celle ci est particulière. C’est la première fois qu’elle trouve un hôte qui soit non seulement consentante à la corruption mais aussi complètement soumise à sa propre volonté, et à en juger des capacités de combat dont elle faisait preuve, celle ci lui serait précieuse. C’est un jouet qu’elle ne casserait pas de si tôt.

    Ne m’insulte pas Petite Sirène.

    La Sphère de Violence dans le creux de son oeil gauche fixe obstinément l’adolescent qui s’est pissé dessus. Cette odeur âcre qui remplit l’air et se mêle avec difficulté au sang cuivré est un délicat fumet pour le Démon, c’est une preuve de l’impact de ce souvenir, un témoin de la gravure éternelle de cet instant dans l’esprit fragile du gamin. Maintenant que le coup est marqué, il faut achever le travail. La Sphère grossit légèrement, empiétant sur l’arcade sourcilière et le haut de la pommette de Capella, la voix physique du Démon résonne dans la salle tandis que le fouet se contorsionne tout seul, comme s’il était animé par une télékinésie venue de nulle part. Le tentacule d’acier s’enroule autour de la gorge du piot, le forçant debout en le relevant brutalement et en le rapprochant de la mercenaire. Soudain, depuis l’épaule de la Sirène, une plaque de cuirasse pousse depuis son omoplate et jaillit vers le gamin en continuant à croître pour former un des bras de Praelia, le bras supplémentaire saisit l’enfant et lui attrape la machoîre en comprimant sa bouche pour l’empêcher de parler.

    ”Survis. Haïs nous, c’est le monde qui a tué tes parents, haït le. Déteste le. Survis et grandis en n’oubliant pas cette colère qui est en toi, façonne la en un esprit de vengeance, chaque respiration que tu prends, c’est avec l’envie de tuer ceux qui ne t’ont pas aidé, c’est avec l’envie de venger ceux qui restent oisifs. Ne m’oublie pas.”

    Et à l’adresse de son hôte Violence rajoute:

    Allons nous-en. Celui ci aura le droit de vivre, il deviendra un instrument de la Mort lui aussi, son petit frère subira passivement sa colère à cause du traumatisme et il le suivra dans ses pas de destruction. Ils ont eux aussi un petit peu de moi en eux.

    Tandis que la mercenaire écoutait religieusement son faux prophète et s’apprête à faire ses préparatifs pour lever le camps, à l’extérieur de la maison de Dagda les cris de terreur et de souffrance n’ont pas échappé aux autres quelques résidents de cette cachette perdue dans la jungle. Ceux qui habitent ici, tout comme la famille du syndicaliste, sont également impliqués de près ou de loin avec le campement de raffinage de drogue planqué par les feuillus, ainsi, tout comme Dagda est rentré après sa journée de travail, la plupart des autres membres du Syndicat sont également retournés à leurs bicoques et ont été alertés du drame qui avait prit place dans la maison de leur supérieur. Quelques uns d’entre eux attendaient donc patiemment à la sortie de la barraque que l’agresseur en ressorte, les bruits à l’intérieur ayant été suffisamment explicite pour leur indiquer que tout le monde avait succombé. Deux mercenaires du gang criminel encadrent la porte d’entrée principale au nord, plaqués contre le mur, tandis qu’un troisième ex-soldat maintient en visée la porte est avec son arbalète, planqué dans les buissons guérisseurs à l’arrière de la maison. Un dernier combattant est prostré en retrait du tout, une boule de flamme chancelante se formant lentement dans ses mains au rythme de son incantation malgré l’humidité tropicale.
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  • Mer 3 Mai - 15:51
    Capella se délecte de la symbiose qu'elle entretient avec la Violence. La gêne que cause son intrusion en elle et la douleur lancinante qui l'accompagne commencent à rejoindre les sensations auxquelles elle s'est habituée. Comme la première fois qu'elle a marché.

    Une part d'elle est surprise qu'une arme sacrée ne soit pas dérangée par la crasse des hérétiques qui la macule, mais elle accepte sa volonté sans l'interroger. Qu'il en soit ainsi. Que les viscères, le sang, les morceaux de tissu et de scalp la salissent. Ce sont les Ombres qui guident le sacrifice, leur parole est absolue. Elle fixe l'enfant avec un sourire silencieux pendant qu'il est, lui aussi, béni par la Mort. Puisse-t-il ne jamais oublier la chance qui lui a été accordée, et qu'il suive la voie qui lui est montrée avec humilité et reconnaissance.

    La sirène sort de la chambre, et compte les flux de mana qui sont apparus autour de l'habitation. Trois… quatre ? La mission est terminée - la Mission peut commencer. Elle peut sentir dans son cœur la faim de la Mort, et elle fera tout pour la satisfaire. Mais même déformée par l'être qui l'habite, même animée par la foi, Capella reste ce qu'elle est. Joueuse. Elle jette un regard malicieux aux petites créatures abandonnées auprès de leurs géniteurs morts, toujours incapables de crier, avant de dévaler l'escalier à toute vitesse. Elle mime une jeune femme en détresse, paniquée, et hurle.

    - A l'aide ! Quelqu'un, un soigneur ! Les enfants respirent encore !

    Sa voix craque, rajoutant à la fausse peur qu'elle y insuffle. Et quand l'une des deux silhouettes de mana enfonce la porte dans l'espoir de pouvoir aider une civile en panique qui se serait retrouvée au mauvais endroit au mauvais moment : il ne voit rien.

    - Merde ! C'était une illusion ?!
    - C'est un piège !


    La porte sur le côté s'ouvre et l'arbalétrier cherche où pointer son arme. La jeune mercenaire, invisible, plante avec un sourire serein sa dague dans son dos. Il titube, lâche son arme, et s'écroule au sol un peu plus loin. Ses deux camarades épéistes crient son nom, qui ne nous importe pas. Le premier interpelle le mage à l'extérieur, le deuxième semble se concentrer pour détecter Capella. La voix dehors crie qu'elle doit se rapprocher pour les aider à localiser l'ennemi.

    Mais les cadavres ne répondent pas.

    La sirène a brisé son invisibilité après avoir poignardé l'épéiste qui la cherchait. Son corps encore chaud lui a servi de tremplin pour bondir sur le dernier, et l'impact de son poids et de ses nouvelles jambes sur sa colonne vertébrale et sa nuque ont suffi à le tuer dans une sonate de craquements.

    Le mage, inquiet, s'agite au loin. Son mana semble moins fluide, hésitant ? Il se déplace lentement, parce qu'il sait que ses collègues devraient lui avoir répondu. Il sent la Mort qui règne en maître sur ce terrain d'affrontement inégal. Capella, cachée dans l'ombre de la porte d'entrée, observe sa proie avec satisfaction. Elle est heureuse d'ouvrir ainsi son cœur, son âme, au Gardien qui veille en elle, et de lui montrer ses petits jeux, ce qu'elle aime faire depuis toujours. Le mage émerge et il a décidé de changer d'approche. Dans chacune de ses mains, une boule de feu. Dans son regard, l'ardeur de l'endeuillé prêt à en découdre. Consciente qu'il la détectera dans tous les cas, la sirène sort de sa cachette, et fait quelques pas en dehors de la maison. Pendant qu'elle l'observait, elle a aussi travaillé sa propre énergie magique. La magie élémentaire n'est pas son fort, mais elle a l'avantage de manier l'élément le plus à même de contrer les flammes. Peu importe la puissance de son adversaire, elle n'est pas là pour décevoir son Prophète.

    Elle lève sa main gauche, et laisse doucement la dague pendre à ses veines. Le mage répond au signal par l'offensive : sa première boule de feu rencontre un fin bouclier de glace qui crée un petit nuage de vapeur. Capella saute sur le côté pour ne pas être prise dans l'émission de chaleur, et lève Son fouet. La deuxième boule de feu vient à sa rencontre, et elle se défend avec une petite boule de neige qui éclate en eau bouillante dans l'air. Cette fois, son bouclier n'est pas de glace : il est humain, il est mage, il est presque tranché en deux par la Violence qui entoure sa taille, en plus d'avoir le dos ébouillanté.

    Ses cris de douleur se mêlent aux cris de panique et de rage dans le village. Un peu partout autour d'elle, la mercenaire sent l'hostilité et la peur des amis, amants, enfants, criminels et innocents, qui craignent pour leur vie.

    - Qui sera le prochain ?

    En bonne apôtre de la Violence : Capella jubile.

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  • Sam 6 Mai - 9:51

    La chair se déchire et en se rompant, délivre le liquide carmin de sa prison, le laisse se déverser au sol. L’humeur coule dans la terre humide de la jungle et se faufile entre les sédiments pour abreuver des graines, des vers, des insectes et s’enfoncer dans les entrailles de Sekaï pendant que les corps entament leur lent retour à la poussière. De cette bénédiction salvatrice qui leur a été attribuée par sa justice divine, Violence ne croit rien. Seule Capella se confond dans sa propre illusion de pouvoirs d’outre-monde, elle pense qu’elle rétablit l’ordre juste des choses, qu’elle contribue à l’équilibre qui devrait être en servant justement ceux qui en sont légitime, mais il n’en est rien pour le Démon qui profite de sa crédulité.
    Mais…
    Le goût. Le goût des souvenirs créés par cette ferveur si intense, si puissante, est enivrant au possible, c’est un goût que l’incarnation de la guerre n’avait pas ressenti depuis l’affrontement qui a rasé Shoumeï de la carte, non… même bien avant ça, c’est un rappel d’il y a plusieurs millénaires, quand la foi des mortels à se battre contre leur oppresseurs titaniques était inarrêtable à tel point que de simples humains, elfes, gobelins et nains ont réussi à repousser des êtres surpuissants. C’est une violence aveugle, un déferlement de haine envers ce qui ne devrait pas exister. C’est exquis.
    La peur. La peur est partout, Capella terrifie les peu de villageois qui restent encore visibles, la peur qui amplifie tout les sens, qui magnifie la menace dans l’esprit des gens et parasite leurs pensées, la peur qui obnubile ceux qui fuient. La peur qui mène à la méfiance. La méfiance qui mène à l’incompréhension. Qui mène à la haine. Qui mène à moi.

    Pendant les brefs contacts entre le fouet démoniaque et la chaire des victimes, Violence a pu comprendre qu’ils combattaient une espèce de bande de criminels organisés, elle avait déjà eu affaire aux membre du Syndicat auparavant mais elle ne pensait pas que cette organisation était aussi répandue. Un gargouillement atroce se fait entendre tandis que par terre, le corps du mage pas tout à fait défunt est prit d’un soubresaut, à bien y regarder avec sa senseur magique il n’est pas encore mort mais à la vue de la quantité de sang qui s’échappe de lui ça ne saurait tarder. Alors que la Petite Sirène fait un pas vers le corps pour l’achever le Démon l’arrête.

    ”Attends. Laisse moi voir.”

    Le fouet s’articule alors tout seul comme animé par une télékinésie pourtant absente, il vient doucement entrer en contact avec les viscères exposés desquels le précieux rouge s’écoule et se contente simplement de pénétrer l’esprit végétatif du mourant.

    D’où venez vous? Ils sont de partout et de nul part, le Syndicat possède des bras dans toutes les villes, toutes les nations.

    Qu’est-ce que vous faites ici? Du trafic, des ressources, de l’argent. De l’argent? Inconscient.

    En continuant son intrusion dans l’esprit aux portes de la mort, Violence tente de raviver des souvenirs, des fragments de mémoires, mais ceux ci s’éteignent au fur et à mesure qu’elle poursuit sa course contre la montre, les signaux vitaux meurent, les neurones cessent progressivement leur activité jusqu’à complètement s’arrêter, un dernier bout de vie lui lâche tout juste quelque chose, comme un cadeau avant le départ vers le Royaume des Gardiens.

    Un nom.

    Kebossa.

    Le fouet famélique se rétracte et retourne s’enrouler autour du poignet de la Petite Sirène, laissant une marge de quelques centimètres entre sa peau et les mailles acérées du fouet afin de ne pas blesser celle qui la tient. Le Démon regarde à nouveau vers le corps de Capella et remarque le village maintenant désertique, toutes ces petites proies qui se sont enfuies dans la jungle en espérant trouver une cachette dans les palmeraies, mais ce n’est pas un problème. La cruauté dont son hôte vient tout juste de faire preuve envers la famille de Dagda et les mercenaires qui les attendait dehors suffit déjà à renforcer quelques petits points.

    ”Accueille le don de ton Gardien.”

    Capella sent son visage bouillir tandis que les tentacules d’influence démoniaque se propagent sous sa peau, traçant des nervures noirâtres sur son visage auparavant si harmonieux. Violence défait la chair, la reforme pour en altérer la construction biologique. En même temps elle parle dans l’esprit de son héraut. Toi qui porte la Mort. L’oeil restant de Capella se déforme, la pupille se fragmente en plusieurs paroies réfractaires, tels des polygones parfaitement réguliers une nouvelle grille alvéolée parcours la surface de sa cornée, captant pleinement la lumière ambiante d’une puissance et d’une saturation telle que s’en est presque aveuglant. Tu es choisie d’entre tous. Le fond de sa rétine se tapisse de cône photosensibles supplémentaires, la Sirène peut maintenant percevoir les mouvements des insectes dans les écorces des arbres, des feuilles et des herbes au gré du vent avec une acuité sans précédent, en revanche sa vision est légèrement floue et les couleurs sont complètement désaturées. Délivre les. Son palais se fend en deux, l’organe voméronasal s’élargit et les capteurs olfactifs s’accroissent, d’un seul coup les effluves qui flottent dans l’air deviennent flagrante et un nouveau monde d’odeur et de phéromones s’ouvrent à la Sirène.

    Qui sera le prochain?

    TOUS

    Grâce à ses sens de prédateur apex, ces villageois sont maintenant des lapins dans la forêt.

    Et le loup a faim.
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  • Ven 12 Mai - 15:04
    Le hurlement rauque que la sirène pousse alors que son visage est détruit puis reconstruit résonne entre les maisons et les arbres. Cette fois, son cri n'est pas plaintif - bien que poussé par douleur, il a toute l'exaltation et la frénésie d'un cri de guerre. Capella embrasse la bénédiction de son Gardien : elle est son élue, sa martyre, elle souffre par et pour lui. C'est une célébration de sa piété, de la Passion qui rencontre la passionnée.

    Mais la réalité est moins glorieuse que l'abstrait. La fière élue des Ombres perd l'équilibre lorsque sa perception visuelle s'intensifie, et tombe à terre. Son corps est secoué par des haut-le-cœur alors que les odeurs et les goûts de la jungle gagnent également en puissance. Elle rampe misérablement vers l'orée des bois, la bave aux lèvres, le temps de s'adapter à ses nouveaux sens. Petit à petit, au fur et à mesure que le kaléidoscope de feuillages et de boue se précise, elle avance à genoux, puis accroupie, puis recourbée. Une fois complètement redressée, elle prend une grande inspiration, et apprécie pleinement tout ce qu'elle est maintenant capable de percevoir. De traquer.

    La Mort les veut tous.

    C'est donc à elle de choisir qui sera sa première cible. L'odeur fleurie et légèrement sucrée d'une fillette se mélange à celle de l'urine que la frayeur a précipité chez elle. Bientôt s'y mêlera aussi l'odeur de son sang, puis de son cadavre putréfié qui se mêlera à la boue. Comme un fauve, Capella s'élance. En tuant les faibles en premier, elle s'assure d'attiser la soif de vengeance des forts pour qu'ils viennent trouver la mort plus vite dans ses bras. Non, dans les siens, et dans ceux de l'entité qui l'habite. (Dans nos bras.)

    La tête de l'enfant git dans une flaque, figée dans une expression de terreur. Celle qui vient de la tuer a déjà localisé sa prochaine cible, mais elle marque une pause avant de reprendre la chasse. Sa vue améliorée ne suffit pas à percer l'obscurité des fourrés sous l'orage - elle peut y pallier, mais préfère se montrer prévenante, car elle ne sait toujours pas si son mana peut atteindre son invité.

    - Gardien, je vais utiliser ma magie pour voir dans le noir. Préviens-moi si je te gêne.

    Ce n'est pas une marque d'amour ni de bienveillance. C'est la volonté d'honorer l'enfant de la Mort quoi qu'il en coûte. Peu importent la douleur ou les obstacles qu'elle doit traverser pour cela : Capella embrasse pleinement son rôle d'hôtesse. Après avoir émis son avertissement candide, elle bondit en avant, à la poursuite de la prochaine odeur.

    La sueur, les courges rôties, une pointe de bois de santal. Une mèche de cheveux bruns qui dépasse derrière un tronc. Trois corps qui tremblent. Quand elle s'approche, la monstresse se rend compte avec délice qu'elle peut jusqu'à goûter leurs larmes. Comme avec la proie précédente, elle n'écoute pas leurs supplications ni leurs insultes : seul le sacrifice sur l'autel de la Violence compte. D'un coup de fouet au visage, elle éborgne le jeune adulte en tablier. Elle égorge les deux cadets avec sa dague avant de jeter leurs corps à ses pieds, et l'achève quand il se penche pour tâter les petits cadavres en pleurant.

    Seize corps plus tard.

    La cultiste, imbibée du sang des jeunes et des vieux, des hommes et des femmes, se dirige vers le campement. Elle sait que les derniers rats s'y sont réfugiés. Ils ont fui les pleurs, les cris de terreur, et le claquement du fouet qui s'abat encore et encore, pour détruire et broyer sans distinction. Le désespoir en poussera certains à se terrer dans des cachettes qu'elle dévoilera facilement, et d'autres à vouloir l'affronter.

    Elle avance plus lentement, parce que le sol est trop mou. Ses pieds s'enfoncent dans la gadoue. Mais ce n'est pas ça qui arrêtera sa Violence. Dans son monde en noir et blanc, Capella pue le sang. Parce que le Gardien n'a pas demandé à rester propre, elle s'est autorisée à tuer aussi salement qu'elle le voulait. Toutes sortes de restes organiques sont collés à ses armes, ses vêtements, ses cheveux, son visage. Elle en est fière. Voilà le visage que la prophétie qu'elle chérit tant lui réserve, celui de l'arme d'une arme, d'un bourreau qui tue non pas par devoir, ni par plaisir, mais par recueillement.

    Épanouie.

    Au campement, les survivants se préparent. Trois font le guet, quatre installent des pièges rapides, six ont pris les armes, deux préparent leur mana, trois protègent la marchandise. Au total il y a deux mages, cinq archers, onze fantassins. Un tonneau a été ouvert et la drogue a été partagée, pour se donner du courage et de la force pour le combat à venir. Ils vaincront, pensent-ils. Ils vengeront les autres, et survivront, parce qu'ils ne veulent pas mourir ici. Pas comme celui qui s'est suicidé quand il a reconnu la voix de sa mère dans ses cris d'agonie quand ils ont fait vibrer les palmiers. Non, non, ils ne cèderont pas à la peur. Ils sont braves, ils savent ce qu'ils valent. Ensemble, ils peuvent gagner.

    En retrait, l'élue les observe. Elle compte les cibles, et planifie son attaque. Son regard s'arrête sur un corps, et s'attendrit lorsqu'elle voit sa position et comprend comment il est mort. Celui-là a répondu de lui-même à l'appel des ombres. Puis soudain, son attention est attirée par un petit groupe à l'écart, que les autres ne semblent pas avoir remarqué. Dans les toilettes sèches se cachent trois signatures de mana. Des lâches qui espèrent que la merde couvrira leur odeur, que personne ne viendra les chercher là-bas.

    Qui attaquer en premier ? Les lâches, les braves ? Attaquer de front, ou méthodiquement ? Tout lui fait envie. Elle pense à la voix qui sonne encore et encore dans sa tête, qui fait vriller ses tempes et palpiter son cœur à chaque ordre, commentaire, remarque. Cette entité en elle qui connaît son corps comme personne ne l'a jamais connu - si elle se laisse modeler, pourquoi ne se laisserait-elle pas manier ?

    - Danse avec moi, ô enfant des Ombres. Je suivrai tes pas. Montre-leur la voie à travers moi comme tu le fais si bien.

    (Utilise-moi encore plus.)


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